« Attends, 2 secondes …»
Dix minutes plus tard, ton ado n’a toujours pas répondu à ton appel.
De mon temps, on disait « Attends, 2 minutes… ».
Oui, le temps s’est rétréci, tout va plus vite, et doit être immédiat.
Et pourtant…
« Un ado » reste « un ado », sauf quand il grandit bien sûr, et devient adulte, comme toi, comme moi.
Pour l’heure, ton ado n’est pas encore un adulte, même s’il aspire très fort à l’être, et te rappelle tous les jours combien vos points de vue sont différents.
Point de vue du parent
Tu n’as pas besoin d’avoir un doctorat en mathématiques pour savoir que « 2 secondes », c’est très court, même plus court que le temps pris pour relire cette phrase.
Alors, quand ton ado te dit « Attends, 2 secondes… », et oublie instantanément ce que tu viens de lui dire, cela peut (parfois) t’agacer.
Depuis que tu as un ado à la maison, le temps est en effet devenu « élastique », et ces « 2 secondes » ne sont plus ce qu’elles sont censées être.
Quand tu dis à ton ado que cela fait cinq fois qu’il te dit « Attends, 2 secondes… » , il te répond avec agacement :
« C’est bon, là ! J’ai dit 2 secondes ».
Et il lève les yeux vers toi, pose ton téléphone portable, et viens t’aider à (finir de) vider le lave-vaisselle.
Ta tentation de te dire que tu as élevé un roi fainéant est alors bien grande.
En ton for intérieur :
- Tu penses faire une demande raisonnable : « Poser la table n’est pas énorme vu que je prépare le repas depuis plus d’une heure » .
- Tu t’attends à ce que tu demandes soit réalisé rapidement ou dans un délai raisonnable, après tout il est tard, et tu as faim.
Point de vue de l’ado
L’ado pense que ses parents sont juste « trop pénibles ».
« Mes parents ne comprennent pas que moi aussi, je suis très occupé ».
« Je ne peux pas tout arrêter, là, tout de suite, juste pour faire ce qu’ils me demandent ».
« Je ne demande pas à ma mère de me déposer chez un ami, alors qu’elle est en réunion d’affaires ».
« Quand j’écris un texto à ma copine, ou que je regarde une série, ce n’est pas le moment de me demander de sortir la poubelle ou de poser la table. Ils n’ont qu’à le faire eux-mêmes ».
Point de vue extérieur et astuces
« Attends, 2 secondes… » est souvent une source de conflit familial.
Cependant, l’ado a sa propre vision, qui n’est pas la même que celle de ses parents, de ce qui est raisonnable quand il s’agit d’accomplir certaines tâches :
- Votre adolescent n’a pas faim à 20 heures car son dernier repas est récent.
- Il ne voit pas pourquoi on ne peut pas vider le lave-vaisselle beaucoup plus tard.
- Votre ado n’est pas obligé de ranger sa chambre juste parce que ses grands-parents vont bientôt arriver.
- etc.
Le parent se sent frustré des tactiques d’évitement de son ado, et l’ado se sent « pris de haut » et se retranche sur sa position si le parent revient « à la charge » toutes les trois minutes.
« Arrête de me le dire, et je le ferai » .
Astuces
- Demande à ton ado ce que veut dire pour lui « Attend, 2 secondes … » : s’il est occupé, demande-lui combien de temps il doit consacrer à sa tâche actuelle.
- Laisse à ton ado l’opportunité d’expliquer avec respect, donc sans s’énerver, pourquoi il ne peut pas accéder immédiatement à ta demande.
- Propose à ton ado de gérer lui-même une alarme de 2 ou 5 minutes, au bout desquelles la tâche demandée devra être effectuée.
- Prend de la marge : si tes invités doivent arriver à 20 heures, ne demande pas à ton ado de ranger ses chaussures qui trainent dans l’entrée à 19h50, mais bien plus tôt, au moins 19h30 ?
- Associe à ta demande une action qu’il apprécie : s’il enlève ses chaussures de l’entrée, ensuite, il pourra diffuser de l’huile essentielle de lavande, qu’il apprécie, pour accueillir les invités de manière plus agréable.
- Discute en amont avec ton ado, des demandes qui ne sont pas négociables.
Par exemple, chez nous, quand je rentre du supermarché avec le coffre plein, il n’est pas négociable d’attendre le bon vouloir de mes ados pour m’aider à monter et ranger les courses. - Relativise : lorsque l’oiseau aura quitté le nid, ses pas trainants pour te rejoindre à table te manqueront.
Si tu t’es retrouvé dans cet article, donne-nous aussi tes astuces dans les commentaires ci-dessous.
Bonjour j’ai aimé l’article j’ai pas d’astuce si non que quand je remarque que c’est très fréquent ; après trois avertissements je promet de fesser et il s’exécute. je ne sais pas si c’est vraiment une astuce mais c’est ce que moi je pratique. rarement j’en arrive là. c a d à la fessée. par contre est ce que vous recommandez ou pas la lecture de vos article avec nos ados eux même c’est à dire de lire avec eux ensemble ?
Bonjour Armand,
A chaud, il nous arrive de menacer notre ado. Quand on y réfléchit à froid, même si cela a paru efficace, je ne pense pas que ce soit adapté.
Qu’est-il préférable ? Que l’ado agisse car il s’est mis d’accord avec ses parents selon un compromis, ou qu’il agisse pour ne pas recevoir de gifle ou pour que ses parents arrêtent de le houspiller ?
L’idéal est bien sûr qu’il s’approprie la demande comme une nécessité, comme ce qu’il est bon de faire pour lui, pour vous, pour la vie de famille.
Pour la lecture des articles du blog avec tes ados, pourquoi pas, à condition que ça ne soit pas obligatoire. Mon fils aîné a été mon premier lecteur pendant plusieurs mois, puis a lâché l’affaire, tandis que mon fils cadet ne s’y est jamais intéressé de près. Tu peux leur dire : “Tiens, j’ai bien aimé cet article. Est-ce que tu pourrais me donner ton avis ?”.
Bonjour Carole Et Merci pour ta réponse pertinente. après recul je crois que mon comportement “excessif et plus ou moins violent” est dû à l’ignorance de quel est la bonne attitude à adopter face à telle ou telle situation en tant que parent. depuis que je lis ton blog et principalement ton e‑book gratuit j’ai fais des pas de géant dans ma relation avec ma famille. Merci pour tes précieux conseils. je crois finalement qu’il devait exister des écoles où les parents apprennent à être parent car aucun enfant n’arrive au monde avec une notice d’utilisation ou un guide utilisateur aidant le parent à l’éduquer et à communiquer avec lui et le monde. Merci encore.
Merci Armand pour ton retour très positif, cela me booste vraiment !
Tout ce que tu as le courage de dire montre que tu es très investi pour ta famille, et que tu en récoltes les fruits.
C’est un véritable cercle vertueux, à entretenir.
Mieux se connaitre pour agir au mieux, et adapter nos vieux schémas à nos besoins d’aujourd’hui 😉
Merci Carole.
Quand j’entends ce “2 secondes” ou “je vais l’faire”, je demande “quand” (avant ou après “quoi” : la douche, la fin de la partie de jeu vidéo, avant le repas, …). C’est plus concret.
Ou alors, je programme le rendez-vous discussion : “là, je dois préparer le repas, je voudrais discuter d’un truc sérieux avec toi/vous, on en parle après manger (surtout si c’est important ou si ça peut tourner au vinaigre ; moins de risque s’il(s) a(ont) le ventre plein !).
Quand j’entends un “Ouais …” d’un ton trainant lorsque je demande qq chose, je suis sûre à 99% que ce que je demande ne sera pas fait. Alors je dis : “j’ai besoin d’aide. Il faut faire ça, ça et ça. Qui fait quoi ?”
Le problème (pour moi) c’est quand certaines tâches ne sont pas prises par un des ados, et je me retrouve à les faire …
Parfois c’est comme tu dis, un échange : tu veux aller voir tes copains jouer au foot ? OK, mais ta chambre doit être rangée. Quand je dis “rangée”, ça veut dire : lit fait, poubelle vidée, vêtements triés et rangés, … [je suis claire sur ce que j’attends].
Ça peut être aussi “on fait tout ça ensemble maintenant, et après on joue à un jeu de société ou on regarde un film, mais il faut que je sois fait pour telle heure sinon après c’est trop tard.”.
Forcément, j’adapte tout ne marche pas ou pas tout le temps !
Bonjour Carine,
Je te remercie pour toutes ces pistes concrètes.
C’est vrai qu’il nous faut nous adapter au quotidien : une véritable gymnastique de l’esprit.
A force d’entrainement, nous y arrivons de mieux en mieux.
Et surtout, il nous faut définir le cadre : ce que nous pouvons accepter ou pas.
A bientôt sur Adolescence Positive.
Carole.