Très souvent, quand un adolescent dit qu’il est malheureux, on lui répond qu’il est normal de se sentir ainsi à son âge. Et si une telle réponse peut sembler rassurante de temps en temps afin de dédramatiser, qu’en est-il lorsque les problèmes sont récurrents et que la réponse est encore et toujours la même ?
Car si l’adolescence est une période de changements et de remises en question, est-ce une raison de trouver normal qu’un jeune de cet âge se sente malheureux ?
Il y a fort à parier qu’une telle généralisation implique de mélanger causes naturelles de tristesse ou de frustration et causes à l’origine d’un réel mal-être totalement normalisé !
Dans cet article invité, écrit par Pablo Jean, du site Scolarité au top, nous allons voir quelques causes souvent invoquées pour justifier du fait qu’un adolescent se sente mal dans sa peau, et montrer en quoi elles n’ont rien de banal ! Car oui, la croyance selon laquelle il est normal d’être malheureux à l’adolescence est selon moi un terrible mythe, que je vais ici m’efforcer de détruire !
Qu’est-ce qu’être un adolescent malheureux ?
Le mot “malheur” est défini par opposition au mot “bonheur”. Ainsi, le malheur est le contraire d’un état d’esprit agréable, positif et durable. En bref, être malheureux, c’est se sentir mal dans sa peau à quasiment chaque instant de la vie, ruminer des pensées et des émotions négatives, et ce sur une longue durée. Avec une définition bien plus rigoureuse du mot, peut-on toujours affirmer qu’il est normal de ressentir une telle émotion ?
En fait, il ne nous viendrait pas à l’esprit de dire qu’il soit normal qu’un jeune enfant, un adulte ou un animal se sente ainsi. Alors pourquoi serait-ce différent pour les adolescents ?
La dépression existe réellement chez l’adolescent, et elle est tout aussi grave que chez les autres personnes. Mais en raison de préjugés et de négligence, on peut croire qu’il ne s’agit que d’une crise d’adolescence qui tourne mal, alors que c’est souvent loin d’être le cas.
Les adolescents ne sont pas aussi malheureux en fonction du pays
L’objection qu’on pourrait alors faire serait de dire que l’adolescence est liée à beaucoup de changements, qui entraînent nécessairement des sautes d’humeur : changements hormonaux, comparaisons aux autres, questionnements … Et s’il y a en effet une part de vrai là-dedans, c’est un argument insuffisant pour justifier de l’état de bonheur d’un adolescent. Car si tel était le cas, le niveau de bonheur de tous les adolescents du monde serait une constante.
Or, selon une étude de la Varkey Foundation, ce dernier varie énormément en fonction des pays. On atteint ainsi par exemple 73% de jeunes qui se déclarent heureux aux Etats-Unis, contre 45% au Japon. D’ailleurs, selon le graphique, les jeunes Français sont les plus malheureux d’Europe !
Il y a donc un impact évident de la culture et du milieu social, mais cela prouve surtout de façon générale que le taux de bonheur d’un adolescent peut varier d’une façon énorme en fonction de sa situation de vie. Voyons quels sont les principaux critères évoqués, et s’ils sont réellement légitimes …
Les causes du malheur : vraiment normales ?
Voyons trois des principales composantes qui caractérisent l’adolescence, et s’il est réellement normal qu’un adolescent se sente malheureux à cause de cela :
L’âge où l’on commence à imiter les désirs des autres
C’est bien connu, nous apprenons et nous nous intégrons à la société principalement par mimétisme. Lors de la petite enfance, nous imitons surtout les comportements des autres, leurs manières de se comporter ou encore la politesse, pour être bien vu et bien intégré.
À partir de l’adolescence, nous nous mettons à imiter les désirs des autres. C’est ainsi que des choses qui nous semblaient totalement dépourvues d’intérêt ou inutiles étant enfant, comme les voitures ou l’argent, peuvent commencer à devenir un centre d’intérêt à partir de cette période.
Le problème, c’est que c’est précisément à cette même période que beaucoup d’autres désirs internes, dont le désir physique, surgissent également. Comment alors être sûr que les questions qui nous viennent sont vraiment importantes pour nous, et comment s’assurer qu’elles ne sont pas accentuées par le fait de se comparer aux autres ?
L’erreur serait de considérer tous les questionnements comme de même nature, et donc de ne pas aider l’adolescent à définir ses priorités et ce qu’il veut réellement. Est-il par exemple normal de se sentir mal car on se trouve moins beau qu’un autre ?
Plutôt que d’aider l’adolescent à déterminer si la question est vraiment importante pour lui, on le laisse patauger en lui disant que le mal-être qu’il ressent est normal. En agissant ainsi, on aggrave certains phénomènes mineurs, tandis que les vrais problèmes sont minimisés, voire ignorés.
En aidant le jeune à trouver sa voie et à se connaître lui-même, il n’y a en fait pas de raison qu’il se sente mal dans sa peau à cause de cela, même si évidemment, les questionnements sont inévitables et n’ont rien d’anormal, s’ils ne rendent pas l’adolescent malheureux .
Changements physiques (qui peuvent nous déplaire)
Les changements physiques s’accompagnent souvent de changements psychologiques, notamment car on peut plus ou moins bien prendre la façon dont notre corps évolue. Là encore, la comparaison avec les autres a un impact considérable sur la façon dont on vit ces changements.
Mais là encore, il y a un problème : comment distinguer nos propres remises en question, qui sont légitimes, de celles qu’on nous met dans la tête à travers des jugements incessants ? D’ailleurs, le fait de vivre dans une société qui propose de remédier à tout défaut, notamment à travers la chirurgie esthétique, n’aide pas les adolescents à s’accepter tels qu’ils sont.
Ressentir des questionnements et des doutes par rapport à son corps peut être légitime, mais pas quand la souffrance est trop forte. Si tel est le cas, il faut réellement s’interroger sur l’environnement de l’adolescent : n’est-il pas par exemple entouré de personnes qui ne font que le juger ou le rabaisser, et l’incitent à correspondre à des critères physiques qui ne lui correspondent pas ?
L’orientation professionnelle
Il s’agit d’un aspect qui prend de plus en plus de place au fur et à mesure que le jeune grandit. Si quand il était petit on se contentait de lui demander ce qu’il “voulait faire plus tard”, on commence à exiger de lui qu’il ait une idée de plus en plus précise de ce qu’il compte faire.
L’étau se resserre, on nous demande de choisir précisément une filière, puis de se diriger vers une certaine école, tout en nous répétant sans cesse que notre avenir se joue là-dessus et qu’il ne faut pas se tromper.
En agissant ainsi, on inculque la fausse croyance selon laquelle nous serions prisonniers d’une filière ou d’un métier toute notre vie, mais en plus, on demande à des jeunes de se projeter à très long terme, dans un contexte économique plus qu’incertain !
Là aussi, on devrait insister sur le fait que chercher sa voie n’a pas à être source d’angoisse, mais plutôt d’excitation. D’ailleurs, les craintes générées par l’appréhension d’un monde du travail hostile devraient surtout être l’affaire du système scolaire, dont la mission est évidemment de bien préparer les jeunes à s’y insérer en accord avec eux-mêmes !
Quelles solutions apporter à un adolescent malheureux ?
Etre à l’écoute de l’adolescent
L’écoute reste la principale des qualités dont il faut faire preuve pour venir en aide à un jeune qui ne se sent pas bien dans sa peau, car il faut être prêt à recevoir ses propos et à ne pas les juger avec les idées reçues habituelles.
Retrouver de la motivation et du sens dans son travail est également indispensable pour avoir une adolescence heureuse et (entre autres) réussir sa scolarité. Je donne d’ailleurs plusieurs pistes pour y arriver rapidement en fin d’article.
Aider l’adolescent malheureux à révéler son potentiel
La deuxième qualité nécessaire est le fait de bien savoir “lire les individus”, autrement dit de savoir les aider à révéler leurs potentiels. Malheureusement, les rares personnes auxquelles peuvent se confier la plupart des jeunes ont parfois tendance à mal les comprendre, et donc à les induire en erreur. Le fait de croire au mythe selon lequel il est normal qu’un enfant soit malheureux à l’adolescence fait partie de ces fausses croyances.
Au niveau social, quand ils confient leurs difficultés à s’intégrer, ils sont souvent poussés à “faire plus d’efforts” ou à “sortir davantage”, alors que non seulement cela peut ne pas correspondre à la personnalité de l’adolescent, mais en plus le problème peut être bien plus profond.
Au niveau professionnel, beaucoup d’adultes ont tendance à projeter leur propre idéal de réussite sur le jeune, ou alors à lui proposer des pistes qui étaient valables il fut un temps mais qui ne le sont désormais plus.
Distinguer crise d’adolescence et mal-être profond
Enfin, les volontés qu’émet l’adolescent sont bien souvent considérées à tort comme faisant partie de sa crise d’adolescence ou témoignant d’une immaturité ou d’un désir de non-conformisme. On a tous en tête l’exemple de l’adolescent rebelle et un poil fainéant qui décide du jour au lendemain de ne plus travailler en cours pour jouer aux jeux vidéos, tel qu’on peut en voir dans les séries.
Mais comment alors le distinguer de celui qui éprouve un réel mal-être à l’école, qui aimerait réellement travailler mais qui souffre d’une phobie scolaire par exemple ?
Si le premier a surtout besoin d’un bon coup de motivation, il n’en est pas de même pour le second, qui peut avoir un réel problème psychologique. Dans ce cas, la mise en œuvre de réelles solutions s’imposent, comme le fait de faire l’instruction en famille par exemple, qui peut être un incroyable révélateur de potentiel et libérer de nombreux enfants malheureux à l’école.
On voit donc finalement que les adultes, et la société en général, ont une grande part de responsabilité dans le niveau de bonheur des adolescents par le comportement qu’ils adoptent avec eux.
Quelles sont vos astuces “anti-malheur” ?
À travers les différents arguments que j’ai évoqués, j’espère avoir définitivement prouvé que cette croyance était fausse, car être malheureux n’est en fait normal pour personne !
En bref, plutôt que de ruminer de fausses croyances, il est grand temps de chercher des solutions pour permettre aux adolescents de mieux se sentir dans leur peau ! N’hésitez donc pas à laisser vos commentaires et à partager vos idées.
Enfin, pour approfondir cette réflexion dans le cadre de la scolarité, vous pouvez consulter cet article et suivre le lien pour télécharger mon livre “7 conseils pour avoir plus de motivation durant sa scolarité et cartonner”.
Le plus important est le partage et l’écoute, dans la vision de l’excellence que prône nos sociétés et enseignements, nous avons mis de côté cela. Réapprenons à faire confiance à la jeunesse et apprenons à ces jeunes de choisir ce qu’ils aiment, ce qui les fait vibrer, ainsi je crois qu’ils auront une première clef vers leur bonheur.
Je suis tout à fait d’accord avec vous. J’ajouterai même qu’ils peuvent changer d’orientation “en cours de route”, tout comme ils seront amenés à changer de métier au cours de leur vie, s’ils le souhaitent.
Tout à fait Lanao, d’ailleurs ce sont des compétences nécessaires pour aider les jeunes à savoir ce qu’ils veulent être et faire, étant donné que ce peut parfois être difficile pour eux de trouver seuls la réponse 🙂